9 ans plus tard dans le passé

J’ai profité de mes congés de cet été pour aller voir mes amis et ainsi faire le tour des enfants que je n’avais pas encore vues ou pas vu (il n’y en avait qu’un dans ce cas) depuis longtemps. C’est fou de voir à quelle vitesse ils grandissent, ils évoluent, surtout quand de son côté on vient de faire un pas de 9 ans en arrière. C’est comme voir la vie défiler à une vitesse, d’un côté en avance rapide et de l’autre en retour arrière rapide. De quoi donner la nausée. On est réellement heureux pour les parents, ses amis, tout en gardant une petite pointe d’amertume.

On compare, forcément. Quel modèle familial ai-je eu ? Était-il vraiment pire pour que j’en sois là ? Il y a eu des hauts et des bas, mais je ne peux pas non plus dire que je me situe dans les pires. En revanche c’est sûr, je me suis quand même mis la pression, la pression pour me dire que je ferais mieux, que je battrais les statistiques, parce que j’en ai l’envie, parce que je suis plus fort qu’eux. Spoiler alert, ça ne suffit pas.

Et du coup on voit la vie avancer, presque en tant que spectateur, à réfléchir sur le bas côté, à réfléchir aux sorties qu’on a pas prises, à réfléchir à celles qu’on ne pourra pas prendre. Et on voit les autres avancer, aussi, plus ou moins vite, toujours heureux pour eux mais toujours un peu amère pour soi. Amère de n’avoir pas fait les bons choix. Amère de n’avoir pas dit les bons mots.

9 ans en arrière, je peux au moins réparer une partie, c’est plus simple par écrit.

Papa, maman, même si ça n’a pas toujours été simple, même si ça ne l’est pas toujours forcément par moment, je vous aime.

Voilà, c’est dit.

Un jour j’arriverai à le dire de vive voix, à me battre contre ce petit je ne sais quoi qui bloque pourtant beaucoup, qui m’a renvoyé 9 ans en arrière parce que les mots étaient restés derrière. Finalement, je suis peut-être parti les chercher, tous ses mots bloqués que je me répète maintenant à moi-même, à 2h du matin sous la couette, comme une ritournelle.

Oui je veux des enfants avec toi.

Bien sûr que je veux que nous nous mariions.

Oui je veux des enfants avec toi.

Bien sûr que je veux que nous nous mariions.

Oui je veux des enfants avec toi. Bien sûr que je veux que nous nous mariions.

Oui je veux des enfants avec toi. Bien sûr que je veux que nous nous mariions. Oui je veux des enfants avec toi. Bien sûr que je veux que nous nous mariions. Oui je veux des enfants avec toi. Bien sûr que je veux que nous nous mariions.

Si vous les voyez sur votre chemin c’est que je ne suis pas loin. Ne vous en faîtes pas, le flot finira par se tarir quand le trafic lié à l’embouteillage de ces non-dits récupèrera son flux normal.

Vous pourrez peut-être croiser ceux-là aussi, sur le passage.

Est-ce que je ferai un bon père ?

Est-ce que je ferai un bon mari ?

Est-ce que tout ça veut dire renoncer à ma vie ?

Est-ce que je pourrai toujours être moi-même ?

Est-ce que je pourrai toujours faire ce que je veux ?

Est-ce que je ne dis pas adieu à tous mes rêves ?

Est-ce que je l’aimerai toute ma vie ?

Est-ce que c’est le bon choix ?

Est-ce que j’en ai vraiment envie ?

Est-ce que je suis la bonne personne pour elle ?

Est-ce que je suis à la hauteur ?

Est-ce que je ne vais pas juste reproduire le même schéma ?

Est-ce que ?

Est-ce que ?

Est-ce que ?

C’est fou comme les questions sont si faciles à poser et les réponses pourtant si difficiles à trouver, surtout quand on y réfléchit seul dans son coin.

Et le pire dans tout ça, c’est qu’elles font barrage pour les autres mots, qu’on aimerait dire mais qu’on a peur de dire, car nous n’avons pas les réponses à ces questions. Et elles bloquent et elles s’entassent et on avance avec un tas de questions qui parasitent et qui s’accumulent et qui enfouissent des mots déjà difficiles à prononcer, puis des mots qui deviennent difficiles à trouver, puis des mots qui deviennent difficiles à chercher.

Je suis aujourd’hui 9 ans dans le passé et je n’ai pas plus de réponses à fournir.

Mais ça n’aura pas servi à rien.

Car maintenant, j’ai réalisé que je m’en foutais de ces questions. Tout autant que de leurs réponses.

9 ans plus tard dans le passé pour en arriver à cette conclusion : je m’en fous.

Et si c’était à refaire, et bien cette fois je le ferais, tout simplement.

Publicité
Cette entrée a été publiée le 25 septembre 2022 à 20:00. Elle est classée dans Billets du vide et taguée , , . Bookmarquez ce permalien. Suivre les commentaires de cet article par RSS.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

%d blogueurs aiment cette page :