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Dès notre plus jeune âge, nous tentons d’échapper à la gravité. Dépendant de nos pères, nous ne pouvons bouger par nous-même, petit être fragile ne supportant pas son propre poids, dominé par une gravité omniprésente.

Puis, petit à petit, notre révolte commence. Nous nous mettons à 4 pattes et pouvons détaler fièrement, notre première étape franchie. Puis nous assumons une position bipède, debout. Alors nous pouvons gambader où bon nous semble, le monde n’ayant plus de limite. Au fur et à mesure que nous grandissons, nous tentons de repousser l’inéluctable, nous escaladons les cieux, centimètre par centimètre.

La croissance. C’est ainsi que nous nommons notre rébellion.

Et puis finalement, un jour, la fatalité nous rattrape. La gravité, non contente de nous voir lui échapper, nous rappelle à l’ordre. Soudain nous nous sentons plus faible, dans l’incapacité de résister. Alors notre croissance se termine. La gravité reprend ses droits. Certains réussissent à aller plus loin que d’autres, mus par une force de résistance supérieure. Alors leur corps s’allongent, s’étire pour se rapprocher plus près des nuages, pour un jour, comme le reste de la population, s’arrêter.

Le ciel a toujours fasciné l’homme plus que la terre. C’est bien pour ça que, par tous les moyens possibles, l’homme tente en vain d’échapper à son destin. Les gratte-ciel, les avions, les hélicoptères, les montgolfières etc.  Mais à chaque fois, la gravité ne lâche pas prise. Bien des fois l’homme s’est cru supérieur. Il pensait vraiment toucher le Graal lorsque, à force de calculs, il réussit à quitter la Terre au moyen de fusées. Cependant, c’était sans compter l’influence de la gravité. Et oui, car la Terre a un satellite, la lune. Et la gravité peut du coup exercer son pouvoir également à partir de ce rocher. C’est ainsi que l’expédition de 1969 se solda par la célèbre phrase que nous connaissons « Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité ». Phrase lourde de sens. En effet, l’humanité venait d’apprendre que la gravité ne les lâcherait pas. Même une fois dans l’espace.

Alors ils revinrent en héros, applaudis par la masse, ne sachant pas ce que cela voulait dire : une existence condamnée à vivre sous le joug d’un tyran les rappelant implacablement que la race humaine appartient à la terre, et qu’elle y retournera. S’entame alors pendant des années une bataille entre l’homme et la pesanteur, entre la survie et la mort.

Des signes ne trompent pas. Tout d’abord, la perte des cheveux. En effet, la capillarité, plus sensible à la gravité que le reste du corps, ressent ses effets la première. La chute des cheveux, commencement d’une destiné inévitable, préliminaire de la fin. Arrive alors un passage. Certains l’appellent l’auréole de l’ange, d’autres la coupe « chaussée aux moines ». Mais ces noms désignent à leur manière la maturité de la personne et son ascension futur vers le ciel. Enfin seulement son âme. Son corps, quant à lui, retournera à la terre.

Puis la gravité se fait de plus en plus pesante. Le corps de l’homme ne peut plus résister entièrement. Ses vertèbres se tassent, son tronc flanche, ses épaules rentrent, son dos se courbe. C’est ainsi que l’homme commence à régresser. De sa fière position bipède, il commence à se flétrir, comme une fleur fane.

Puis vient le moment où le corps, ne supportant plus cette gravité a besoin d’aide pour ne pas sombrer ; canne, déambulateur, tout est bon pour résister jusqu’à son dernier souffle.  Mais malgré cela, les chutes se font plus fréquentes, les os moins solides et l’envie de résister moindre. Alors l’homme, en paix avec lui-même accepte son sort, fier d’avoir résisté aussi longtemps à son destin. Heureux d’avoir réussi à se dresser face à la gravité, de s’être dressé comme ses pères, qu’il a vu choir les uns après les autres.

Et malgré sa condition, l’homme se dressera toujours, préférant mourir fièrement sur ses deux pieds plutôt que de vivre à genoux.

Tant qu’elle regardera en l’air et espérera, l’humanité vivra.

Cette entrée a été publiée le 28 août 2013 à 09:49. Elle est classée dans Billets du vide et taguée . Bookmarquez ce permalien. Suivre les commentaires de cet article par RSS.

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