Dit donc, je ne sais pas ce qu’il s’est passé ici, mais c’est un sacré bazar ! Faire ça dans notre magnifique base. Regardez à quel point les gravures sur les pierres sont sophistiquées. Vous ne pouvez pas être insensible à un tel degré de précision dans la ciselure et le taillage de ces blocs de roche.
Observez la taille de ce cristal ! Pas étonnant que les inhibiteurs soient dotés d’un tel pouvoir. Et regardez les finitions sur chaque garde de la muraille ! C’est impressionnant ! J’ai presque l’impression qu’ils vont se retourner vers moi tellement ils semblent vivant, réels géants de pierre, gardien de la lumière dans les contrées obscures adjacentes au champ de justice.
Sur ma gauche, une tour partiellement détruite se dresse, vestige de l’histoire de la région. Je ne voudrais pas m’avancer mais elle ressemble aux vieux avant-postes qui permettaient de prévenir de l’arrivée imminente du dragon. En hauteur, les soldats pouvaient alors tenter de verser un nuage de flèches sur le monstre. Le dragon n’est désormais plus une menace, tout du moins hors du champ de justice. Mais à travers cette relique du passé, on peut se rendre compte des temps de terreur que ce dernier a fait vivre aux habitants de cette région.
Les tours de la botlane, et de toutes les lanes d’ailleurs, ressemblent, tout comme les soldats des murailles, à des guerriers de l’époque draconique. Peut-être cela vient-il d’une volonté architecturale de rappeler à chacun les dangers.
Les murailles sont désormais envahies à certains endroits par la forêt de sapins, et quelques pierres runiques auréolées de bleu sont encore apparentes au travers des broussailles et des arbres.
Je me demande à quoi pouvait bien servir cette barrière… Elle restera dorénavant toujours ouverte, bloquée par les feuillages, laissant l’accès ouvert à un chemin à jamais oublié, bloqué par un éboulement. Combien de personnes empruntaient ce chemin auparavant ? Les anciens seraient-ils capables de nous conter l’histoire de ce champ de justice, bâti au sommet de cette montagne, à flanc de falaise, qui abrite des monstres effrayants et légendaires tels que les corbins, les lycans ou encore le dragon et le Baron Nashor ?
Du côté ennemi, je croise des bêtes étranges, mais toujours pas un seul signe d’activité hostile. Si seulement les gens étaient plus intéressés par l’histoire que par la guerre, nous pourrions peut-être en apprendre plus sur notre passé et sur les querelles qui opposent dorénavant nos peuples.
Notre chemin continue, la jungle sur notre droite, partagée entre muraille défoncée par des racines géantes et des sapins et entre des couloirs d’herbe, n’inspirant rien d’autre qu’une escarmouche sanglante.
Les tours sont toutes anéanties et la seule que nous voyons encore debout est celle de l’inhibiteur, assaillie par une armée de sbires, que nos rangs ne vont pas tarder à grossir. La terre aux alentours est peuplée de magnifiques fleurs bleues, comme si plus que de l’eau, elles avaient besoin de sang pour se développer. Et stratégiquement parlant, c’est le meilleur endroit pour ça.
Aucun champion ennemi à l’horizon, aucun champion allié non plus. Nous nous écrasons comme des sbires sans cervelle sur la tour, ne réfléchissant pas autrement que comme nous avons été entrainés. Avancer, toujours avancer, peu importe le prix.
Le nombre de nos morts ne cesse de croître et le chiffre ne va pas tarder à augmenter considérablement avec l’approche de la championne ennemie. Quelques coups de boomerang et moi et mes alliés ne faisons plus que pâle figure, spectres de ce que nous avions été quelques secondes plus tôt.
Et une dose de fertilisant sanguin de plus pour les fleurs bleues. Le mien pourrait-il donner une fleur jaune ? J’ai toujours aimé les fleurs j…
Chapitre 16 : Une sorcière tout feu tout flamme | Chapitre 14 : Méga mécha | Prologue
Image : Théo Allard